Le blues du curé (partie 1/2)Samedi jour de confesse et le curé a le blues, le confessionnal ne désemplit pas. Les gens confondent ce lieu de culte avec un photomaton.Elle a attendu dehors que les portes de l’église ouvrent, elle tient absolument à être la première. Elle soulève le voile, s’assied confortablement, oublie l’homme de foi qui patiente derrière la grille s’arrange les cheveux regarde en face d’elle en pensant être devant une glace, corrige son rouge à lèvre se repoudre le nez. Et le curé, lui, il bande. Sont-ce véritablement des conditions idéales à une repentance ? Elle débite des horreurs comme une liste de courses. Elle a téléphoné à son boulot en prétextant des règles douloureuses pour rester au lit jusqu’à midi lors d’un apéritif elle ne l’a pas dit mais a pensé très fort qu’elle était la plus intelligente du bureau elle a mangé quatre éclairs et trois religieuses avant d’aller se faire vomir pour sa ligne elle a volé un slip à dentelles et des porte jarretelles assortis à Monoprix sans remord aucun avec son portefeuille plein elle a giflé le petit dernier uniquement pour le plaisir et sa colère s’est calmée lorsqu’elle a vu la marque des doigts imprimée sur la peau tendre elle trouve qu’on vit bien mieux de l’autre côté de la rue. Sur le même ton et avant que l’homme en noir n’ait le temps de dire quoique ce soit elle a récité trois Ave deux Pater comme on règle le psychanalyste, elle s’est dressée a soulevé le voile et a laissé à l’ecclésiastique en pleurs un sillage de Thierry Mugler.Elle est sortie du confessionnal comme on sort d’une cabine de douche : lavée de tous péchés et prête à recommencer.Et le suivant s’est assis sur la place chaude. Un communiste ! Et qui, sous le petit abri de bois renie sa couleur rouge et se bat la coulpe, tout en jurant ses grands Dieux, pardon mon père, n’avoir jamais chanté l’internationale jusqu’au bout, mais mon père, bafouille-t-il le dernier pape n’était-il pas polonais ? Il mélange tout la faucille et le goupillon la banlieue rouge et la cathédrale d’Evry le parti et Georges Marchais à l’église la charité Dieu mon père n’a pas le monopole de la charité le front populaire a envoyé des enfants pauvres au bord de la mère, il mélange tout l’homme il a même une grosse moustache mais il ne sait pas s’il la doit à Lénine ou à Trotski il mélange tellement tout, mais si subtilement que le curé en perdrait son latin. Maintenant l’homme rouge est assis, silencieux, il attend l’absolution.Il a le blues le curé assis sur sa planche, même s’il a transgressé les lois de l’ascèse il a rajouté un coussin. Entre un psy. Le curé connaît le pénitent, bien souvent le pénitent, lui ne connaît pas le curé. Mon père, j’ai couché avec une patiente c’est mal que dois-je faire ? C’est venir me voir qui est un péché, ne trouvez-vous pas ?A suivre...
30 avril / série "20"
30 avril / Le blues du curé (partie 1/2)
vendredi 30 avril 2010, par